La Haute Autorité de Santé a au mois de juin une consultation publique sur les recommandations pour améliorer la qualité de vie des adultes autistes. L’idée étant de donner son avis sur une version préliminaire des recommandations afin de les améliorer. Étant donné que seules les organismes et associations peuvent répondre à cette consultation, je ne peux pas donner mon avis directement.

Par conséquent, j’ai envoyé mon avis à l’association Asperansa. Je leur suis reconnaissant d’avoir plutôt bien accueilli mes remarques. Toutefois, si vous êtes une association et que vous n’avez pas encore soumis votre opinion, n’hésitez pas à reprendre des parties du texte ci-dessous.

Après la lecture du document, il apparaît que les recommandations sont très nombreuses et assez complètes ce qui je trouve, est une bonne chose.

 

Ma principale remarque est que l'emploi des personnes autistes ne soit abordé que brièvement dans le document avec seulement 20 recommandations (246 à 266) alors que l'emploi est l'activité dans laquelle les gens passent l'essentiel de leur vie. Il manque je pense des recommandations sur comment aider les personnes à trouver un emploi qui leur convienne, quelles sont les adaptations et les aménagements de postes les plus courants, etc. Ces questions ne semblent pas être abordées.

 

Également, une chose qui n'est formulée que brièvement dans le document est que beaucoup de personnes autistes ne vont pas chercher l'aide dont elles ont besoin, souvent parce qu'elles n'ont pas envie d'être perçues comme différentes et d'être traitées différemment, que ce soit dans le travail ou à l'université. Par exemple, les enfants autistes doivent parfois quitter la classe en plein cours, en passant devant les autres élèves, pour aller à une séance chez l'orthophoniste par exemple. En se faisant remarquer par tous les élèves en quittant le cours et en se sentant traité différemment, il arrive un moment où la personne n'a plus envie de recevoir l'aide qui pourtant lui est nécessaire. Ainsi, à l'université et dans un emploi, il n'est pas rare que les personnes autistes ne réclament pas l'aide qui leur est nécessaire. La personne n'a pas envie de se faire remarquer par tous les autres étudiants ou par les collègues et refuse donc l'aide d'un coach ou je ne sais quelle autre soutien. Il faut à mon avis faire en sorte que l'aide fournie le soit de la manière la plus discrète possible et ce point n'est pas assez souligné dans le document (et ne l'était déjà pas dans les recommandations pour les enfants).

 

Ma remarque suivante pourrait porter soit sur la Section 6.2, parlant de l'université soit sur la Section 2 qui est plus générale. Jusqu'au lycée, les parents peuvent parler à la place de leur enfant, peuvent demander les aides et remplir les dossiers administratifs pour leur enfant. À l'université et après dans l'emploi et dans la vie de tous les jours, il faut souvent se débrouiller seul, et les personnes autistes doivent être capable de demander elle-même les aides dont elles ont besoin. Or, actuellement, nous n'enseignons cette compétence que très rarement aux personnes autistes.

 

Enfin, l'accessibilité pour les personnes autistes n'est que peu traitée. La recommandation 112 indique de : « vérifier l’accessibilité et sensibiliser les acteurs du territoire (services publics, commerçants, associations du quartier, etc.) aux particularités des personnes autistes. » et la recommandation 131 indique de « Réaliser des aménagements raisonnables au sein des lieux publics pour assurer un confort sensoriel ». Personnellement, je pense que cela est bien et va dans la bonne direction, cependant la recommandation ne va, je pense, pas assez loin. Sensibiliser le personnel des services publics, les commerçants, les enseignants, les élèves, etc à l'autisme est essentiel mais il faut également faire les adaptations nécessaires (qui ne sont pas nécessairement sensorielles). Publier sur le site web du commerçant des photos du magasin et la fréquentation attendue heure par heure n'est qu'un exemple de ce qui est rarement fait alors que cela ne profite pas seulement aux personnes autistes mais à tout le monde.

Pour terminer, j’ajouterai qu’il est dommage que les axes de la formation (Section 5.2) ne se concentrent que sur les professionnels de santé et des travailleurs sociaux. Il me semble important que tout le monde soit formé à l’autisme, des élèves à l’école primaire ou au collège en passant par les vendeurs dans les magasins, les personnels des services publics, sans oublier les décideurs, comme les chefs d’entreprise, les ressources humaines mais aussi les élus comme les maires ou les députés. Beaucoup trop de monde a des idées reçues sur l’autisme, ce qui se traduit par des comportements bizarres. Juste pour prendre un exemple, certaines personnes ne s’adressent aux personnes qui m’accompagnent plutôt qu’à moi ou me parlent doucement et/ou très forts comme si je n’étais pas capable de comprendre ce qu’ils disent. Cela est très lié au fait que les personnes ont une très vague idée de ce qu’est le handicap et ne savent pas du tout ce qu’est l’autisme.

J’espère maintenant que les avis seront pris en compte pour l’élaboration de la version finale des recommandations. Bastien.